Sons contés
écrit par stéphane Davet
Chanteur, pianiste, conteur fantasmagorique, depuis 1990, un univers singulier et une discographie prolifique (rassemblée cet automne en un coffret de 18 CD, Mouvement perpétuel).
Admirateur de la fougue textuelle des auteurs antillais, le fils aîné de Jacques Higelin se confronte également à l’exigence poétique, comme en témoignait récemment Le Cauchemar Merveilleux (Actes Sud), recueil de vers et d’ »espèces de petits contes », qu’il choisit aujourd’hui de faire entrer dans une autre dimension. Celle d’une mise en son agencée par une plasticienne, Léonore Mercier, au sein d’un dôme de 24 enceintes, le Synesthesium, permettant aux auditeurs de vivre une expérience immersive multisensorielle.« Nous aimons tous les deux raconter des histoires, constate Arthur H. Moi avec des mots, elle avec des sons dont la puissance évocatrice stimule l’imagination plus que ne le feraient des images. »
Pianiste de formation et musicienne électro-acoustique, Léonore Mercier affine depuis quelques années un concept « cinéma pour l’oreille », où l’artiste se fait d’abord chasseuse de sons.
« Je me balade avec un enregistreur numérique, en ville ou à la campagne, en quête de ce quittera ma matière première, explique la jeune femme. Ces moments me permettent plus tard de basculer du travail documentaire vers celui de la fiction. » La lecture des poèmes d’Arthur H a fait naître des mots et des images sur la base desquels elle a dessiné la colonne vertébrale d’un scénario avec la palette de sa banque de sons. Un dôme géant d’armatures métalliques sur lesquelles sont accrochées 24 enceintes permet la spatialisation d’une partition synonymes de décollage sensoriel. Inspiré d’un studio de l’Ircam, ce Synesthésium invite sous sa coupole une soixantaine de spectateurs auditeurs à pénétrer dans les onze textes dits par le chanteur, au rythme de trompe-l’ouïe tournoyant, planant, miroitant, coulant, soufflant ou se brisant autour d’eux, accompagnés des stimuli des jeux de lumière.
Ce voyage immobile enchevêtre univers aquatique, aérien ou tellurique, ambiances apaisante, surnaturelle ou hallucinatoire, au gré d’un onirisme que Léonore Mercier peut piloter en chef d’orchestre. Après une série de performances parisiennes au Théâtre de la Cité internationale, Le Cauchemar Merveilleux se déploiera, en mai 2016 à l’Opera de Lille, avant de filer à Montréal.